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DU TOUR DE FRANCE.

dans la voiture, entraînée par le cheval, qui, après avoir couru toute la nuit, revenait au hasard ; que dans le premier moment elle avait eu la force de lui dire comment cet accident était arrivé ; et il fit à cet égard le conte arrangé avec le Corinthien. Puis il aida mademoiselle de Villepreux à transporter sa cousine dans son appartement, tandis que les domestiques examinaient les harnais du cheval, que Pierre avait eu soin de déranger et de rompre en plusieurs endroits pour faire croire à une révolte sérieuse de sa part. Ce pauvre animal fut le seul calomnié de l’aventure. Personne ne soupçonna la vérité. Wolf, qui n’avait rien vu, et qui ne se rappelait pas seulement comment les choses s’étaient passées, ne put se disculper. On l’eût chassé si la marquise, après avoir eu une attaque de nerfs, n’eût demandé vivement sa grâce. Pierre fut remercié dans les plus beaux termes par le comte de Villepreux. Mais rien ne valait pour lui un mot d’Yseult ; et comme il l’attendait toujours, il allait retourner tristement à l’atelier, lorsqu’elle s’approcha de lui, lui tendit la main, et la lui serra, devant tout le monde, avec une franchise d’amitié dont ses traits confirmaient la rayonnante effusion. C’était un autre bonheur que celui du Corinthien ; mais il n’était peut-être pas moindre.

CHAPITRE XXVII.

Les bulletins de la guerre d’Espagne arrivaient chaque jour plus pompeux pour l’armée française officielle, et plus alarmants pour l’armée secrètement organisée du Carbonarisme.

La capitulation de Malaga avait suivi de près la victoire du Trocadéro. Riego tenait encore, en attendant que le même roi qui lui avait présenté en tremblant son cigare