Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/281

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— Je ne dis point de mal d’eux, messire ; je parle d’un seul que je connais, et qui n’a du moine que l’habit et les patenôtres. C’est Jean le Clope, qui a servi M. le marquis à la guerre, et que M. le marquis a fait entrer au couvent en qualité de frère oblat.

— Eh ! par ma foi, l’avis est bon ! dit le marquis ; Jean le Clope est un homme sûr et qui a vu trop de faces blêmes penchées en terre sur les champs de bataille, pour s’effrayer du soin que nous allons lui confier.

— Alors, hâtons-nous, dit M. d’Ars ; car vous savez que mon intendant se meurt, et que je voudrais le voir, s’il en est temps encore.

— Partez, mon cousin, dit le marquis ; songez à vos affaires ; celles d’ici ne regardent plus que moi !

Ils se serrèrent la main.

Guillaume rejoignit ses gens et prit avec eux la route de son manoir : le marquis et Adamas s’arrêtèrent chez la Caille-bottée, où Jean le Clope était effectivement, et reçut avec effusion son protecteur, qu’il appelait son capitaine.

On sait que le frère oblat était un militaire estropié au service du roi ou du seigneur de la province, et dont le couvent était forcé de prendre soin.

La plupart des communautés religieuses étaient obligées, par contrat, de recevoir et entretenir ces débris des malheurs de la guerre, parfois trop bon vivant pour de pieux solitaires, parfois beaucoup moins corrompu que les moines eux-mêmes.

Quoi qu’il en soit des carmes de La Châtre, dont nous n’avons pas à rechercher ici l’histoire, le frère séculier Jean le Clope s’astreignait fort peu à la règle de la maison, et s’il ne manquait pas les heures de la pitance, il manquait celles de la retraite.