Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/295

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bien, écoutez, mes amis, dit-il en se relevant avec un peu d’effort. Vous entendîtes, avant-hier, cette prédiction à moi faite par des gens qui n’étaient pas bien sorciers : « Avant trois jours, trois semaines ou trois mois, vous serez père ? »

— Eh bien, dit de Beuvre revenant à son humeur narquoise, vous croyez, mon brave homme, que la prédiction se réalisera ?

— Elle est réalisée, mon voisin. Je suis père, et ce n’est plus pour moi que je demande, à vous et à la divine Lauriane, sept ans d’espérance et de sincérité : c’est pour mon héritier, c’est pour mon fils unique, c’est pour…

Ici, la porte s’ouvrit à deux battants, et Adamas, en grande tenue, annonça d’une voix claire et avec un air de triomphe :

— M. le comte Mario de Bois-Doré !

La surprise fut pour tout le monde ; car le marquis n’attendait pas si vite l’apparition de son enfant, et il ne savait encore en quel équipage on réussirait à le produire.

Quelle fut sa joie lorsqu’il vit entrer Mario vêtu à la paysanne, c’est-à-dire d’un habit exactement semblable de forme et de tissus à celui qu’il portait lui-même ; le pourpoint de satin à mille petits crevés sur les bras ; le colletin sans ailerons (pourpoint de dessus à épaulettes, mais sans manches pendantes), en velours blanc crevé d’argent ; les chausses flottantes, de quatre aunes de large, froncées jusqu’au-dessous du genou, garnies de boutons de perles et un peu ouvertes de côté pour laisser sortir la rose de la jarretière ; les bas de soie, avec les souliers à pont-levis fermés de roses ; la fraise à confusion, c’est-à-dire à plusieurs rangs inégaux avec