Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/303

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Mais une vieille femme, la doyenne du village, vint à lui, appuyée sur sa béquille, et lui dit d’une voix chevrotante :

— Monseigneur, vous êtes béni du bon Dieu pour avoir été doux et humain aux pauvres ahanniers. Vous avez fait oublier votre père, qui était un homme rude à vous comme aux autres. Voici un enfant qui tiendra de vous et qui empêchera qu’on ne vous oublie !

Le marquis serra les mains de la vieille et laissa Mario serrer les mains de tout le monde.

Il fit boire à la santé de son fils, et but lui-même à celle de la paroisse, pendant qu’Adamas faisait encore tonner son artillerie.

Comme la foule s’éloignait, le marquis aperçut M. Poulain, qui observait toutes choses sans sortir d’un petit hangar, où il s’était placé comme dans une loge de spectacle. Il lui coupa la retraite en allant le saluer et l’inviter à souper et en lui reprochant de ne venir jamais.

Le recteur le remercia avec une politesse énigmatique, disant, avec un feint embarras, que ses principes ne lui permettaient pas de manger avec des prétendus.

On disait dans ce temps-là, selon l’opinion à laquelle on appartenait, les réformés ou les prétendus réformés. Quand on disait les prétendus tout court, c’était l’expression d’une orthodoxie qui n’admettait même pas l’idée d’une réformation possible.

Cette expression dénigrante blessa le marquis, et, jouant sur le mot, il répondit n’avoir point de fiancés en sa maison.

Je croyais M. et madame de Beuvre fiancés avec l’erreur de Genève, reprit le recteur avec un sourire perfide ; auraient-ils divorcé, à l’exemple de M. le marquis ?

— Monsieur le recteur, dit Bois-Doré, ce n’est point