Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/188

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place. Ils étaient furieux de ce qu’il ne leur répondait point, et prenaient son empêchement pour du mépris. Mais il s’est trouvé là une dame qui l’a reconnu et qui a dit que M. le marquis le rachèterait fort cher. On l’a donc lié comme nous, et, à cette heure, il doit être, avec quatre autres de nos camarades, délivré comme moi, ou mort dans la bataille.

Quant à cette dame, qui est harnachée en manière d’officier, je ne sais point qui elle est ; mais le ciel me confonde si on ne dirait point de la demoiselle Bellinde !

— Ah bien, Denison, allons-y voir ! répondit Aristandre, et sauvons tous nos amis, si faire se peut !

Le bon carrosseux rassembla en courant tout ce qu’il put, et se porta sur le flanc des reîtres avec assez d’intelligence et d’à-propos.

Pris alors sur trois côtés et réduit de moitié, car Bois-Doré, Guillaume et M. Robin leur avaient déjà tué autant de monde que Saccage leur en avait enlevé par sa défection, les reîtres réunirent l’effort de leur petit bataillon serré pour faire retraite en bon ordre par leur flanc gauche.

Mais une si petite troupe était trop facile à envelopper ; leur canon, marchant à l’arrière-garde, était déjà tombé aux mains de M. Robin. Ils ne purent même pas se débander. Il leur fallut se rendre à discrétion, sauf quelques-uns que la rage aveuglait et qui se firent encore tuer, non sans avoir endommagé leurs adversaires à pied.

Il fallut du temps pour désarmer et lier les prisonniers ; car on ne pouvait guère se fier à des paroles de reîtres, et le jour paraissait quand on se trouva tous réunis, vainqueurs et vaincus, dans la cour du manoir.