Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/233

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magie et condamnée aux flammes temporelles : c’était la dernière ressource, quand les persécutés venaient à bout de ne pas se laisser convaincre d’hérésie par leurs aveux.

Enfin, le 30 novembre, nos personnages, pleins d’espoir et de joie, rentrèrent au manoir de Briantes.

On avait reçu de bonnes nouvelles de M. de Beuvre. Il avait écrit bien des fois ; mais ses courriers avaient été interceptés ou infidèles. Il allait arriver ; il arriva, en effet. On lui fit de grandes fêtes ; après quoi, on parla de se séparer.

Il était convenable que Lauriane retournât dans son château, et le gros de Beuvre se trouvait à l’étroit dans le petit manoir de Briantes. Lauriane ne devait pas montrer à son père qu’elle eût la moindre répugnance à reprendre la vie avec lui. Elle n’en éprouvait certainement pas, tant elle était heureuse de le retrouver ! Cependant elle ressentit une sorte de mélancolie soudaine et involontaire, dès qu’elle rentra dans le triste château de la Motte.

Les beaux messieurs de Bois-Doré lui avaient fait la conduite et devaient, à la prière de son père, rester deux ou trois jours auprès d’elle. Mercédès et Jovelin étaient de la partie. Ce n’était donc pas la sensation de l’isolement qui déjà s’emparait d’elle ; ne pouvait-on pas d’ailleurs, et ne devait-on pas se revoir presque tous les jours ?

Ce vague effroi qui troublait Lauriane, c’était une sorte de désenchantement dont elle ne se rendait pas compte. Elle avait toujours voulu prendre son père pour un héros ; ses inquiétudes au couvent, à l’idée des dangers qu’il avait courus pour sa cause, avaient porté jusqu’à l’enthousiasme l’idée qu’elle se faisait de lui. Il fallait en