Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/269

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Elle était forcée maintenant de reconnaître que son père, dont l’avidité l’avait tant humiliée, ne faisait qu’un peu plus tard ce que la plupart des gens de son âge avaient fait toute leur vie, ce que la plupart des jeunes gens étaient pressés de faire à leur tour. Encore M. de Beuvre était-il des meilleurs ; car il n’avait pas l’idée de trahir son drapeau. Il se dépêchait seulement de faire ses affaires avant qu’il fût renversé.

Une exception pouvait se rencontrer pour Lauriane. Il y avait des exceptions, puisqu’elle-même en était une. Elle n’en rencontra pas, peut-être parce que, rêveuse et distraite, elle ne sut pas la chercher.

La jeunesse et la beauté sont fières à juste titre. Elles attendent qu’on les découvre, et ne découvrent rien elles-mêmes, dans la crainte d’avoir l’air de s’offrir.




LXIX


Bien que nous ayons fait jusqu’ici notre possible pour suivre nos personnages dans la vie de noblesse sédentaire que nos renseignements nous permettaient d’étudier un peu, nous voici forcé de franchir encore un peu de temps, et de chercher les beaux messieurs de Bois-Doré assez loin de leur paisible manoir.

C’était en 1629, le 1er mars, je crois. Le mont Genèvre, couvert de frimas, offrait le spectacle d’une animation extraordinaire sur ses deux versants, et jusqu’à l’entrée du défilé appelé le Pas de Suse.

C’était l’armée française en marche sur le duc de Sa