Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/151

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près de toi : tu ne veux pas m’aider à lui donner ce bonheur-là ?

— Comment pourrais-je vous aider ? dit Gaston ému et troublé.

— En ne me cachant plus ce que tu sais.

— Monsieur Roger, vous me torturez, je vous jure sur l’honneur que je ne sais rien.

— Tu mens ! s’écria Roger en retenant les deux mains d’Espérance dans les siennes. Tu sais au moins que nous avons la même mère !

Gaston rougit, pâlit, se leva, comme pour fuir, et retomba en disant :

— Plût au ciel, monsieur Roger ! mais cela n’est pas. Qui a pu vous dire cela ?

— Quelqu’un qui le savait, l’homme qui m’a élevé, mon précepteur, mon ami, un homme de bien, l’abbé Ferras !

Cette révélation tomba sur moi comme un coup de foudre. Je perdis la tête, j’entrai brusquement en m’écriant :

— C’est impossible ! monsieur le comte plaide le faux, croyant saisir le vrai. Un honnête homme n’eût pas trahi la confiance de vos parents. M. Ferras ne vous a pas dit cela !

— Ah ! ah ! dit Roger en me toisant avec une ironie cruelle, et toi, l’honnête homme, tu écoutes aux portes ? Voilà ce que je ne savais pas, ce qui me confirme dans l’idée que tu as été capable de me faire beaucoup de mensonges !