muette.) Peste soit de l’esprit rebelle qui n’a pas voulu parler !
LE CRITIQUE, bas, au peintre. Voilà les plus mauvais qu’il ait encore faits.
LE POËTE. Eh bien, que dites-vous de cela ?
LE MAESTRO. Les vers sont beaux.
LE POËTE. Mais l’accompagnement ? vous ne m’auriez pas cru capable d’accompagner ainsi ?
LE MAESTRO. Comment, l’accompagnement ?
LE PEINTRE. Vous avez remué les doigts avec beaucoup de grâce !
LE MAESTRO, au critique. Est-ce que vous avez entendu un accompagnement ?
LE CRITIQUE. Monsieur s’est accompagné de beaux gestes, de poses très-nobles et d’une expression de visage vraiment remarquable.
LE POËTE. Monsieur, vous cherchez en vain à me rendre ridicule. Je ne suis pas musicien ; ma profession est plus relevée. Si j’ai tiré de cette lyre des sons harmonieux, tout l’honneur en revient à l’ouvrier habile qui l’a fabriquée.
LE MAESTRO. Mais, mon ami, c’est vous qui voulez vous amuser à nos dépens ! Je vous donne ma parole d’honneur que vous n’avez tiré aucune espèce de son de cet instrument.
LE POËTE. Je vous trouve plaisant, vous aussi ! Un maître de chapelle sourd ! Cela nous explique vos symphonies !
LE CRITIQUE, au maestro. Ne contrariez pas monsieur : c’est un des plus beaux privilèges de la poésie de voir et d’entendre dans les ténèbres et dans le silence.
LE PEINTRE, esquissant toujours. Quant à moi, j’ai été