Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/113

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— Venez voir ma jolie cabine ! lui dit-elle en prenant son bras.

Et il se laissa emmener.

Il l’aimait tendrement à coup sûr, mais il avait la pudeur anglaise portée au plus haut point, et il était facile de voir que tout ce qui ressemblait à la familiarité, même avec sa propre femme, le faisait souffrir hors du tête-à-tête. Ceci m’expliqua le soin avec lequel il la tenait cachée ; elle vivait sur le navire comme elle m’avait paru vivre à Luz et à Perpignan, c’est-à-dire comme une femme turque toujours cloîtrée dans son gynécée. Elle semblait se plaire dans cet isolement, car elle n’essayait pas d’en sortir sans sa permission et ne faisait point un pas sans lui. Il la promenait de temps en temps sur le tillac. Elle était alors soigneusement voilée.

Je la vis encore moins à Marseille, où nous prîmes un jour de repos. Au lac Majeur, nous fûmes vite installés dans une très-belle villa où déjà ils avaient passé l’automne précédent, et où j’eus une chambre charmante avec un beau cabinet de travail. De mon appartement, je n’apercevais rien de ce qui se passait dans le sien ; une tendine de soie fermait son balcon, et celui-de sir Richard était entre nous. Seulement j’étais étonné du bruit qui se faisait chez la recluse ;