Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/176

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bref, et, s’il en était autrement, Richard ne le saurait pas ; par conséquent vous ne le sauriez pas non plus. Je ne comprends pas que Dolorès, qui m’a vue si souvent en défaillance, vous ait appelé pour si peu.

Je crus devoir la questionner avec insistance. Elle me répondit :

— Eh bien, oui, la vie que je mène m’est contraire, et, si elle ne finit bientôt, elle me tuera. Songez donc : passer des mois entiers sans sortir du même jardin ! voir tous les jours les mêmes fleurs, faire le tour des mêmes allées ; quel ennui, quand Richard n’est pas là !

— Vous montez à cheval avec lui assez souvent.

— Cela me fait plutôt du mal. J’ai peur à cheval et même à âne.

— Vous êtes poltronne à ce point ?

— Je le suis devenue ; enfant, j’étais intrépide ; mais, depuis la peur que j’ai eue de mon père, ces scènes que je vous ai racontées… et puis les gâteries de Richard ! quand on est trop heureux, on devient lâche.

— Pourtant vous bravez quelque chose de plus méchant parfois qu’un cheval ou un âne, vous bravez la maladie, puisque vous êtes souvent indisposée et ne voulez pas qu’on vous soigne.

— Si fait, si fait, docteur, Dolorès suffit. Quand