Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/310

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parlerait avec Dolorès, qui en parlerait à tout le monde. Les femmes font bon marché de l’autorité légale, et toi-même tu ne me parais pas avoir jamais compris les graves conséquences de ton sublime dévouement pour la marquise de Mauville.

— Allons ! dit ma mère, il faut donc te tranquilliser pour empêcher d’inutiles et pénibles conflits avec M. Brudnel ; c’est trop tôt, c’est beaucoup plus tôt que je ne le voulais : j’aurais préféré te laisser croire encore qu’il y avait entre Jeanne et toi des obstacles insurmontables ; mais tu m’arraches la vérité. Je ne veux pas que tu puisses supposer que ton père a commis à mon instigation une faute aussi grave que celle de tromper la municipalité. Tu as vu l’acte de naissance bien authentique de ta sœur Jeanne, morte en naissant : je ne t’ai pas montré son acte de décès, voilà tout, mais il existe, et aucun officier civil n’a été trompé. Jeanne, la fille de mon amie Fanny Ellingston, a été portée aux enfants trouvés, d’où on l’a retirée aussitôt pour la mettre en nourrice. Telle était la volonté de sa mère, qui ne voulait pas la laisser exposée au juste ressentiment de son mari. Les circonstances étaient telles, qu’il ne pouvait pas douter de sa faute, et c’était un homme terrible, capable de tout ; mais, pour te faire comprendre les nécessités que j’ai