Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/235

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— Ah ! ah ! Comment ferez-vous pour exercer ce droit-là malgré moi ?

— Vous me l’accorderez.

— Jamais !

— Jamais est ici un mot contre lequel votre conscience d’homme et de père proteste en vous-même.

— Comment ça, s’il vous plaît ?

— Votre honneur vous défend de repousser l’insistance d’un jeune homme que vous savez parfaitement honnête, digne, sincère et respectueux. Votre sentiment paternel vous prescrit de l’examiner davantage avant de renoncer au bonheur qu’il peut apporter dans votre famille. »

Le général s’est trouvé fort embarrassé pour répondre. Je crois que ses idées bondissaient dans sa tête comme le grain sur un van. On ne sait jamais s’il comprend bien ce qu’il a l’air d’écouter ; mais la tenue d’Émile, le son de sa voix et la limpidité de son regard agissaient évidemment sur son appareil nerveux. Émile a frappé le dernier coup en se tournant vers l’abbé Fervet et en lui disant avec une grande aménité :

« Allons, monsieur, vous qui m’estimez aussi et qui regrettiez la précipitation de M. le général, aidez-moi donc à le convaincre. »

L’abbé s’est réveillé comme en sursaut ; mais, avant qu’il eût eu le temps de répondre, le général l’avait interpellé avec l’empressement d’un enfant qui saisit la robe de son pédagogue pour se couvrir.

« Oui, l’abbé ; oui, c’est à vous de prononcer ! Vous savez, moi, je m’en rapporte à vous. Faut-il attendre encore un peu ? Faut-il couper court aux pourparlers ? »

L’abbé s’est remis de son trouble.

« La question, telle que vous l’aviez posée, reste entière, si M. Émile persiste à ne pas la modifier. Vous