Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/237

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blâmable en thèse générale, mais qu’il s’agissait ici du bonheur de mademoiselle La Quintinie… Et, comme impatienté de ce subterfuge, j’allais lui demander, moi, de quoi il se mêlait, mademoiselle La Quintinie est arrivée à nous d’un air sérieux et résolu.

Son apparition a embarrassé le général, qui s’est empressé de dire à demi-voix :

« Parlons d’autre chose. »

Mais Lucie avait entendu ou deviné, et, prenant la parole avec une certaine sévérité :

« Mon père, a-t-elle dit, je sais fort bien ce qui se passe, et j’y suis trop intéressée pour ne pas vouloir y assister. D’ailleurs, je vous apporte un avis grave et triste. Mon grand-père est fort souffrant. La discussion beaucoup trop vive qui a eu lieu en sa présence hier au soir lui a fait passer une mauvaise nuit. Il n’a pu assister au déjeuner, et je viens de le trouver si pâle et si abattu, que j’en suis inquiète. Il se tourmente beaucoup des résolutions que vous prenez en ce moment. Vous savez qu’elles lui déplaisent, qu’elles l’irritent et l’affligent. Ce n’est point à son âge que l’on supporte de sérieuses contrariétés. Quelque parti que vous ayez pris ou que vous comptiez prendre, je viens donc vous dire que je me refuse jusqu’à nouvel ordre à laisser dire le dernier mot de la situation. Le grand-père demande à voir M. Lemontier. Je prie donc M. Lemontier d’aller le trouver, de lui laisser l’espérance de voir les choses s’arranger entre nous, et de revenir demain, plusieurs jours de suite, s’il le faut, pour le calmer et le guérir. »

Le général, qui est peu tendre pour son beau-père, a cassé le bec d’ambre de sa pipe en la posant avec dépit sur le rebord de la terrasse. Il a regardé son cher abbé d’un air de détresse comme pour lui dire de parer le coup. L’abbé, très-pâle, a remué les lèvres ; mais mademoiselle