Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/38

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que possible tout ce discours de notre ami, parce que madame Marsanne, voyant que je ne recherche pas sa fille, te consultera probablement avant d’écouter un autre prétendant. Peut-être que tout cela ne t’apprend rien, qu’elle t’a déjà écrit la tournure que prenaient les choses en ce qui concerne Élise, et que depuis longtemps tu as pénétré le caractère et les idées d’Henri. Peut-être que tu les as pesées dans ta sagesse, et que tu as déjà porté ton jugement. Permets-moi cependant de te dire le mien. Élise Marsanne et Henri Valmare me semblent faits l’un pour l’autre, et j’ai quelque sujet de croire qu’ils s’entendent déjà fort bien.

Quant à mon avis,… qu’importe ? Puis-je dire que j’ai un avis, une théorie quelconque à opposer au programme que mon ami s’est fait sur l’amour et le mariage ? Non, en vérité, je n’avais pas encore beaucoup pensé au mariage, moi, et, depuis que j’aime, tout se résume pour moi dans le besoin de l’amour éternel, de l’amour exclusif. Le mot de mariage ne m’offre pas un sens à part, et je ne peux rien discuter à ce sujet avec Henri, qui fait de l’amour une sorte de satisfaction physique légitime, énergique et amicale, mais où il semble que les croyances, les opinions, les idées en un mot doivent faire éternellement deux lits.

Je lui ai juré que ni toi ni moi n’apporterions d’obstacle à ses projets, et je le priai de ne pas se préoccuper des miens à ce point de vue.

Deux jours après, nous allâmes rendre notre visite à M. de Turdy. Il était seul. Sa petite-fille va de temps en temps voir sa tante à Chambéry. Les jeunes personnes du monde vont rarement ainsi seules dans leur voiture. Moi, je n’y trouvais rien à redire, je devais croire et je croîs à la fidélité et au dévouement des vieux serviteurs auxquels M. de Turdy confie son unique enfant ; mais