Page:Sand - Malgretout.djvu/107

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Il faut subir un mal pour en éviter un pire. Adda sera forcée de voir la vérité quand elle verra disparaître sa propre fortune ; mais elle retrouvera ce qui me reste, cette terre que je ne veux pas aliéner, asile définitif de son père et de ses enfants. C’est assez pour vivre honorablement, mais ce ne serait pas assez pour une nouvelle famille, et j’ai dû me vouer au célibat. Comprenez-le et ne me présentez pas l’idée d’une destinée plus riante : ou je ne serais pas capable de l’apprécier, ou il me faudrait regretter de ne pouvoir la saisir.

— Eh bien, répondit Abel, qui m’avait écoutée en serrant mon bras contre sa poitrine, il faut changer cette destinée qui vous enlace, sans rien changer au programme de votre dévouement. Il faut en effet abandonner le Rémonville à ses folies, tâcher d’apprendre à votre sœur la résistance à ses dilapidations. C’est son devoir de mère ; mais elle est une enfant, vous l’avez dit, et je doute qu’elle fasse son devoir. N’importe, vous lui laisserez, à elle et à ses enfants, le reste de votre fortune. Achetez ainsi votre liberté, c’est facile, et ce sera très-sage. Vous prendrez de tels arrangements, que votre beau-frère ne puisse déposséder sa femme du gîte et du revenu que vous leur assurerez. Faites cela, miss Owen ; c’est un acte à passer chez un notaire. Alors, vous aurez l’esprit tranquille. L’inévitable avenir des Rémonville sera, non plus une chaîne qui vous étrangle, mais une avalanche que vous ne