Page:Sand - Malgretout.djvu/153

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ses témoins le lendemain, c’est-à-dire ce matin. Nous les attendîmes, Abel resta chez lui toute la matinée, et je ne le quittai pas. À deux heures, le vieux général se fit annoncer, et nous allâmes l’aider à descendre de sa voiture. Il nous apprit que la parole d’Abel avait produit en lui une explosion de mépris qu’il avait eu le tort de contenir jusque-là.

» — Que voulez-vous ! ajouta-t-il, on est vieux, on est garçon, on s’ennuie chez soi. Il n’y a pas beaucoup de maisons où l’on s’amuse sans être gêné dans les entournures. Les Rochetal ont quelquefois de l’esprit, on rencontre du moins des gens d’esprit chez elles ; on y va, on ne cherche point à approfondir, on a tort ! Je savais tout ce que vous avez reproché hier à Rémonville, je cherchais à n’en être pas sûr. Pourtant des créanciers indiscrets m’avaient parlé d’une belle-sœur dont on exploitait le dévouement. L’assurance avec laquelle vous avez porté votre accusation m’a fait rougir de ma tolérance… Un vieux militaire, que diable ! ça doit l’exemple de l’honneur. Je n’ai pas hésité, j’ai pris mon chapeau, et je suis sorti cinq minutes après vous, saluant la personne du sexe, grâce à son sexe, mais tournant le dos au Rémonville, qui me tendait la main. Les autres ont fait comme moi. Vous savez que je ne vais pas vite dans les escaliers, le salon était à peu près vide quand j’ai regagné ma voiture. À présent, mon cher, je présume que votre adversaire va se présenter ; moi ; je viens m’offrir