sion qu’elle semblait me commander irritaient de plus en plus mon adversaire.
— Laissez-le donc dire, s’écriait-il ; Edmée, ne vous mêlez pas de cela ; je veux le battre sur tous les points. Si vous nous interrompez toujours, je ne pourrai jamais lui prouver son absurdité.
Et alors la bourrasque soufflait en crescendo de part et d’autre, jusqu’à ce que le chevalier, profondément blessé, sortît de l’appartement et allât passer sa mauvaise humeur sur son piqueur ou sur ses chiens de chasse.
Ce qui contribuait à ramener ces querelles déplacées et à nourrir mon obstination ridicule, c’était la bonté extrême et le rapide retour de mon oncle. Au bout d’une heure, il ne se souvenait plus de mes torts ni de sa contrariété ; il me parlait comme de coutume et s’enquérait de tous mes désirs et de tous mes besoins avec cette inquiétude paternelle qui le tenait toujours en haleine de générosité. Cet homme incomparable n’eût pas dormi tranquille, s’il n’eût, avant de se coucher, embrassé tous les siens, et s’il n’eût réparé, par une parole ou un regard bienveillant, les vivacités dont le dernier de ses valets avait eu à souffrir dans la journée. Cette bonté eût dû me désarmer et me fermer la bouche à jamais ; j’en faisais le serment chaque soir ; mais, chaque matin je retournais, comme dit l’Écriture, à mon vomissement.
Edmée souffrait chaque jour davantage du caractère qui se développait en moi, et elle chercha le moyen de m’en corriger. S’il n’y eut jamais de fiancée plus forte et plus réservée, jamais il n’y eut de mère plus tendre qu’elle. Après beaucoup de conférences avec l’abbé, elle résolut de décider son père à rompre un peu l’habitude de notre vie et à transporter notre établissement à Paris pendant les dernières semaines du carnaval. Le séjour de la campagne,