Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/91

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du lait pour elle au moulin, et j’ai pris le chemin des écoliers pour faire dix minutes d’exercice.

— Ah ! vous en êtes trop privée ! dit M. Sylvestre ; j’ai peur qu’au métier que vous faites vous ne tombiez malade aussi.

— Non, non, je ne serai pas malade, je n’en ai pas le temps.

Et, avec un sourire de mélancolie enjouée, tout en serrant encore la main du vieillard, elle me salua sans me regarder, mais avec politesse, et continua son chemin. Farfadet parut irrésolu et regarda son maître. Alors, celui-ci, avec un sérieux incomparable, lui dit :

— Allez ! accompagnez cette demoiselle, ne la laissez pas seule, et revenez chez nous quand elle sera rentrée chez elle.

En vérité, le chien parut comprendre, car il s’élança sans hésiter sur les traces de la jeune fille et nous ne le revîmes plus.

— Voilà une ravissante personne ! dis-je à M. Sylvestre ; je sais où elle demeure, je l’avais déjà vue à la source.

— Oubliez où elle demeure, si vous êtes un homme sérieux, répondit vivement le vieillard. Cette fille est ce qu’il y a de plus respectable au monde, et quiconque troublerait son repos ou ferait seulement parler d’elle deviendrait l’ennemi de Dieu !

— Je ne sais pas si je suis un homme sérieux, monsieur Sylvestre, mais je crois être un honnête homme. Soyez, donc tranquille, et dites-moi ce qui motive votre estime pour elle, afin que mon respect lui soit d’autant plus assuré.

— Mademoiselle Vallier est venue ici il y a deux ans ;