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Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/194

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neuve, mais qui est et sera toujours ingénieuse. La migraine a été créée pour les femmes qui ne veulent pas se laisser voir ; l’entorse a été mise au monde pour les hommes qui ne veulent pas les aller voir : ce sont deux accidents qui n’ont pas besoin de cause, et que personne ne peut nier, parce que personne ne peut les constater ; outre qu’ils n’ont rien de révoltant pour la pensée, l’entorse n’estropie pas plus un homme que la migraine ne défigure une femme ; mais l’entorse a cette supériorité sur la migraine, qu’elle dure longtemps, qu’elle peut durer tant qu’on veut, comme se dissiper en vingt-quatre heures. Elle a été inventée à l’usage de l’homme, en ce qu’elle est le moyen d’un plus grand déploiement de force morale.

» En deux mots, j’ai pris cette entorse au château de Puy-Verdon, dans la soirée qui a suivi ton départ, Éveline faisant les yeux doux, la patte de velours et la bouche en cœur à son petit cousin, soit pour rallumer sa flamme, soit pour exciter la mienne. Dans le premier cas, j’ai trouvé le tour commun et ennuyeusement classique. Dans le second, j’ai jugé que j’avais servi assez longtemps de stimulant aux ardeurs du cousin, et qu’il m’était bien permis de prendre un peu de repos, après avoir joué mon rôle et rempli mon office.

» Dans le doute, abstiens-toi, dit la sagesse des nations, Je me suis donc abstenu de retourner à Puy-Verdon ; mais je suis homme de trop bonne compagnie pour ne pas avoir une entorse pour excuse. Quand mon pied sera guéri, si mon cœur ne l’est pas, j’irai voir où en sont mes chances.

» Tu as eu tort, cher Flavien, de me dire par trois fois : Épouse Éveline ! Ce mot m’a terrifié comme le Tu seras roi ! des sorcières de Macbeth. On n’a pas plus tôt l’idée