Nathalie, restée seule, pleura des larmes de rage. Elle se sentait éprise de Flavien avec une intensité qui était comme un châtiment de Dieu prononcé sur elle ; car Flavien la haïssait, et elle le voyait bien.
Cependant Crésus arrivait à la ferme des Rivets, cherchait M. Dutertre dans la campagne, et lui remettait la lettre d’Éveline.
— Je crains qu’on ne me trompe pour me rassurer, dit-il en pâlissant, après l’avoir lue. Pour un léger accident, on ne m’enverrait pas un exprès, on ne m’écrirait pas soi-même. Crésus, ma fille est tombée de cheval ?
— Non, monsieur, dit Crésus triomphant. Elle n’y a pas monté d’aujourd’hui.
— N’importe ! dit Dutertre, en qui les entrailles paternelles produisirent comme une vague divination, je suis sûr que ma fille a fait une chute affreuse ! je le sens dans tout mon corps !
— Allons, monsieur, reprit Crésus, qui était fier de sa mission, voilà que vous vous tourmentez trop. C’est ce que madame avait peur. Aussi elle m’a dit comme ça : « Si tu vois monsieur tranquille, tu ne lui diras rien de plus ; si tu le vois qui se casse la tête de ça, tu lui donneras ma lettre. » Et la v’là, monsieur, puisque vous vous la cassez, la tête !
Olympe écrivait à son mari :
« Je ne veux pas vous tromper, mon ami, votre arrivée ici en serait plus pénible. C’est plus qu’une entorse, c’est une luxation. Mais tout est réparé par les soins du bon Martel. Éveline ne souffre presque plus ; elle n’a aucun autre mal ; c’est de l’ennui pour elle, parce qu’il faudra du repos, mais vous ne devez prendre aucune inquiétude. Croyez-en celle qui ne vous a jamais menti. »
Olympe avait écrit avec effusion cette dernière phrase,