— D’ailleurs, dit Martel en s’en allant, vous avez ici le meilleur des médecins : c’est votre femme ! Savez-vous qu’elle nous fait concurrence ? Elle avait fait à Éveline un premier pansement admirable. Vraiment les femmes d’esprit excellent dans tout et font tout ce qu’elles veulent. J’ai vu, dans les chaumières des pauvres gens, des merveilles de prévision et d’intelligence qu’elle avait faites en attendant ma visite.
— Oui, dit Dutertre, quoique d’une santé assez délicate elle-même, elle s’occupe beaucoup de la santé des autre.
Et, entraîné par une aveugle fatalité à chercher le mot de l’énigme de Nathalie, il ajouta :
— Elle sort quelquefois avec le jour pour porter assistance aux pauvres.
— Parbleu ! reprit Martel, elle était levée ce matin plus tôt que moi ; car, quand j’ai fait ma tournée dans le village, elle y avait déjà passé.
— Ah ! elle est sortie ce matin ? dit Dutertre rusant malgré lui et jouant l’indifférence.
— Bon ! dit Martel très-innocemment ; quand elle a trouvé ce matin Éveline dans le parc sur les neuf heures, elle avait déjà fait sa grande tournée, elle ! Oh ! c’est un grand cœur que madame Dutertre ! Tout pour les autres, rien pour elle-même ! Mais, si je vous parlais d’elle, je ne m’en irais pas. Bonsoir.
Et Martel s’en alla, laissant Dutertre rongé d’une funeste curiosité.
— Votre femme est une sainte ! dit à son tour Blondeau. Mais elle ne se ménage pas assez. Elle est délicate et se fatigue au delà de ses forces.
— Oui, n’est-ce pas ? dit vivement Dutertre. Je suis sûr qu’elle est exténuée aujourd’hui ! Sortie depuis la pointe du jour ! Où a-t-elle été, ce matin ?