Page:Sand - Nanon, 1872.djvu/150

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XII


Sans dire un mot, sans remercier, Émilien prit le bras de Dumont et l’entraîna dans l’escalier ; il traversa avec lui la rue et le mit dans le chemin par où ils étaient venus, en lui disant :

— Marche devant sans te presser et sans te retourner. Ne t’arrête nulle part, n’aie pas l’air de m’attendre. J’ai encore un mot à dire à M. Costejoux, je te rejoindrai par la traverse ; mais n’attends pas, ou nous sommes perdus tous deux. Si tu ne me vois pas en route, tu me retrouveras plus loin.

Dumont obéit sans comprendre ; mais, quand il eut fait une demi- lieue, l’inquiétude le prit, Émilien ne revenait pas. Il se dit que, connaissant les chemins mieux que lui, il l’avait devancé. Il marcha encore. Quand il eut gagné la première étape, il voulut attendre, mais il était observé par des allants et venants, et, craignant de donner l’éveil, il poursuivit son chemin et se reposa dans un bois. Il arriva le lendemain au moutier, doublant le pas dans l’espoir d’y trouver son maître. Hélas, il n’y était pas et nous l’attendîmes en vain. Il avait voulu sauver son vieux domestique ; mais il n’avait pas voulu compromettre M. Costejoux,