Page:Sand - Nanon, 1872.djvu/245

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en faisant trop durer son voyage, et de le remettre à une autre nuit avec des mesures mieux prises.

Il revenait donc quand il se trouva face à face avec un ancien garde de Franqueville qui s’appelait Boucherot, et qui était pour lui un vieil ami, très honnête homme et très sûr. Ils s’embrassèrent de grand cœur, et Boucherot, qui venait de passer la nuit dans ce village où il avait une sœur mariée, lui apprit tout ce qu’il voulait savoir.

Le_ _marquis de Franqueville était mort à l’étranger peu de temps après sa femme. On n’avait pas de nouvelles du fils aîné. Les biens confisqués avaient été vendus, même le parc et le château, que M. Costejoux avait achetés à vil prix. Il y avait installé sa mère et une petite demoiselle qu’elle appelait sa petite-nièce, qui se montrait fort peu, mais que plusieurs personnes du hameau environnant disaient être mademoiselle Louise de Franqueville, très grandie et embellie.

Quant à lui, Boucherot, il l’avait vue de près, il en était sûr ; mais il disait à ceux qui se souvenaient d’avoir détesté la petite Louise que ce n’était pas elle. Au reste, elle ne courait pas grand danger, eût-elle été nommée tout haut. M. Costejoux était devenu très puissant dans le village depuis qu’il avait déjoué les intrigues de Prémel et accusé publiquement Pamphile de rançonner les prisonniers et de vivre de concussions. Il avait mis tant de fermeté à les démasquer, qu’on les avait mis en jugement et envoyés à la guillotine. Boucherot ajouta que, si Émilien était encore en prison, il serait prochainement délivré par M. Costejoux qui était le plus juste et le plus généreux des hommes.