Page:Sand - Nanon, 1872.djvu/273

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sa sueur, mais son argent, jamais. Quand il n’avait pas d’engrais, la terre s’en passait. La terre rapportait en conséquence. Avec beaucoup de temps, elle s’améliorait quelque peu, mais je voyais venir le moment où tout l’argent caché viendrait se jeter dans l’achat des terres, et je voulais faire marcher de compagnie l’acquisition et le plein rapport, afin d’arriver à doubler tout d’un coup la valeur du capital. La chose me réussit ; en 93, on m’offrit de ma terre environ deux cents francs.

— Non pas, répondis-je, ce serait rentrer sans profit dans ma dépense. J’attendrai.

En 95, j’ai vendu ce lopin cinq cent quatre-vingts francs. D’autres achats me rendirent beaucoup plus ; mais je n’entrerai pas dans un détail fastidieux. Tous ceux qui à cette époque ont fait leurs affaires savent qu’il a fallu, pour réussir, la confiance qu’ils ont eue dans les événements. Dans nos campagnes, ce fut d’abord le petit nombre. Jusqu’à la fin de la Convention, ceux qui avaient acheté voulaient pour la plupart revendre et ils revendaient avec perte. Sous le Directoire, ils commencèrent à racheter, ce qui constitua beaucoup de pertes sèches au commencement ; et, malgré tout, ils trouvèrent encore leur compte plus tard, à plus forte raison, ceux qui, comme moi, ne se laissaient pas épouvanter par les menaces et les colères des partis, firent-ils en peu d’années des profits réels et très légitimes.