Page:Sand - Narcisse, 1884.djvu/101

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Albany, il avait eu quelques succès dans les grandes villes et même à Paris ; mais il n’avait, en somme, rencontré que fort peu la gloire, et pas du tout la fortune. Je le plaignis et l’exhortai à retourner auprès de son père. Il me promit de le faire, sinon avec la résolution de renoncer à la vie d’artiste, du moins avec la ferme intention, disait-il, de reconquérir l’affection qu’il avait froissée. Mais, pour effectuer ce projet, il lui fallait passer quelques jours à la Faille pour remplir l’engagement d’y chanter, et avoir de quoi faire le voyage de Touraine.

» Je lui offris de lui prêter la somme nécessaire. Il refusa avec sa hauteur accoutumée.

» — Dès lors, lui dis-je, notre entrevue était inutile. J’ai choisi une position qui me fait un devoir d’obliger tous ceux qui réclament mon dévouement, et même d’aller au-devant des besoins de ceux qui, comme vous, sont trop fiers pour le réclamer. Si je ne puis rien pour vous, permettez que je vous quitte : mon temps ne m’appartient pas.

» Je fus un mois sans le revoir et sans entendre parler de lui, bien qu’il chantât au théâtre de la ville, et que les répétitions des chœurs d’opéra vinssent quelquefois se mêler, comme un bizarre et infidèle écho, aux chants de nos religieuses dans la chapelle.

» Un matin, je reçus la visite du docteur Fourchois. C’est un très-excellent homme, peu riche, qui s’adresse