Page:Sand - Nouvelles (1867).djvu/304

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trouvait seul à la campagne, forcé, pour ainsi dire, de réfléchir et de contempler sa situation. Bien que le voyage de lady Mowbray dût être d’une quinzaine de jours tout au plus, elle avait semblé très-affectée de cette séparation, et lui-même n’avait point accepté sans répugnance l’idée qu’un tiers allait venir se placer dans une intimité jusqu’alors si paisible et si douce. Le caractère romanesque d’Olivier n’avait pas changé ; son cœur avait le même besoin d’affection, son esprit la même candeur qu’autrefois. Avait-il obéi à la loi du temps, et son amour pour lady Mowbray avait-il fait place à l’amitié ? Il n’en savait rien lui-même, et Metella n’avait jamais eu l’imprudence de l’interroger à cet égard. Elle jouissait de son affection sans l’analyser. Trop sage et trop juste pour n’en pas sentir le prix, elle s’appliquait à rendre douce et légère cette chaîne qu’Olivier portait avec reconnaissance et avec joie.

Metella était si supérieure à toutes les autres femmes, sa société était si aimable, son humeur si égaie, elle était si habile à écarter de son jeune ami tous les ennuis ordinaires de la vie, qu’Olivier s’était habitué à une existence facile, calme, délicieuse tous les jours, quoique tous les jours semblable. Quand il fut seul, il s’ennuya horriblement, engendra malgré lui des idées sombres, et s’effraya de penser que lady Mowbray pouvait et devait mourir longtemps avant lui.

Metella retira sa nièce du couvent et reprit avec elle la route de Genève. Elle avait fait toutes choses si précipitamment dans ce voyage, qu’elle avait à peine vu Sarah ; elle était partie de Paris le même soir de son arrivée. Ce ne fut qu’après douze heures de route que, s’éveillant au grand jour, elle jeta un regard attentif sur cette jeune fille étendue auprès d’elle dans le coin de sa berline.