À MAURICE SAND.
Nohant, 15 juillet 1868.
Il fait sombre, l’orage s’amasse, et déjà vers l’horizon les hachures de la pluie se dessinent en gris de perle sur le gris ardoise du ciel. La bourrasque va se déchaîner, les feuilles commencent à frissonner à la cime des tilleuls, et la flèche déliée des cèdres oscille, incertaine de la direction que le vent va prendre. C’est le moment de rentrer les enfants, les petites chaises et les jouets fragiles. L’aînée voudrait jouer encore sur la terrasse, elle ne croit pas à la pluie ; mais le vent vient brusquement gonfler les plis de sa petite jupe, une large goutte d’eau tombe sur sa main mignonne. Elle saisit sa chère Henriette, la poupée favorite, et vient se réfugier dans mon cabinet.
Alors commence un nouveau jeu : le jeu, la fiction, le drame de la pluie. L’enfant ouvre une ombrelle et marche effarée par la chambre ; elle se livre à une pantomime charmante de grâce et de vérité. Elle se courbe sous les coups de