Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/103

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Elle quitta le foyer en me souriant ; moi, je restai à pleurer en silence : je venais de brûler mes vaisseaux.

Un matin, pendant que l’on répétait la dernière pièce qui devait être jouée avant la fermeture annuelle, je me trouvai seul au foyer avec un homme de taille moyenne et fort bien fait, dont la physionomie me fit l’effet d’un de ces souvenirs qu’on ne peut plus préciser. Il pouvait avoir de trente-cinq à quarante ans. Il avait les yeux petits, le teint brun assez coloré, la figure large et carrée sans être massive, la bouche grande, le nez court et busqué, le menton plat, bien rasé, les cheveux collés au front et aux tempes. Tout cela constituait une laideur enjouée, aimable au possible. Le moindre sourire relevait plaisamment les coins de sa lèvre, et creusait les fossettes indécises de ses joues. Ses prunelles noires étaient d’une vivacité perçante, sa mâchoire avait des angles d’une indomptable énergie ; mais la pureté de son front et la délicatesse de ses narines corrigeaient par je ne sais quoi de net et d’exquis les appétits d’une nature belliqueuse et sensuelle. Il était impossible de ne pas reconnaître en lui à pre-