Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/302

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la faute de mon père si je m’étais follement attaché à une personne qui ne voulait aimer personne !

Un jour, que je traversais les Alpes dans un traîneau avec Bellamare, il m’avait demandé l’issue de mes amours avec la comtesse. Je lui avais alors dit toute la vérité, ou à peu près. À ce moment-là, je m’étais bien persuadé que je n’avais plus d’amour pour Impéria, que je n’en aurais plus, et que Bellamare pouvait, sans me nuire, lui répéter mes confidences. J’avais d’ailleurs atténué beaucoup dans mes révélations l’ardeur de ma passion première, et j’en avais laissé le début inédit. Je ne m’étais point vanté d’avoir embrassé la carrière du théâtre à cause d’elle. J’avouais simplement qu’à l’époque de l’aventure de Blois, je m’étais senti plus épris d’elle que de l’inconnue. Je pus raconter sincèrement tout le reste.

Le jugement de Bellamare sur cette situation m’avait beaucoup frappé. Il m’approuva d’abord, et il ajouta :

— Tu as pris sans le savoir le meilleur chemin pour être véritablement aimé de cette comtesse, la sincérité d’abord, la fierté ensuite. En te laissant voir ses soupçons, elle s’attendait à de vives répliques, à une lutte où elle ne se fût déclarée vaincue