Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/35

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au bal, au théâtre, aux cours et dans la rue.

Je ne vous raconterai pas mes aventures et mes agitations de la première année. Je revins au pays pour les vacances. J’avais travaillé et pas trop dépensé. Mon père était enchanté de moi et disait :

— M. le baron se ravisera.

Mes camarades du faubourg me trouvaient délicieux parce que je redevenais paysan avec eux. L’hiver suivant, après la rentrée des écoles, une femme décida de ma vie.

Nous étions de toutes les premières représentations à l’Odéon. Nous faisions grand bruit pour les pièces dont nous ne voulions pas et pour celles que nous voulions soutenir. Il y avait alors à ce théâtre une petite amoureuse que l’on appelait sur l’affiche mademoiselle Impéria. Elle jouait inaperçue dans ce qu’on appelle le répertoire. Elle était merveilleusement jolie, distinguée, froide par nature, par inexpérience ou par timidité ; le public ne s’occupait point d’elle. À cette époque-là, on pouvait jouer pendant dix ans les Isabelles ou les Lucindes de Molière et les seconds rôles de la tragédie sans que le public y prît garde, et sans qu’à moins de haute protection on obtînt le moindre avancement.