Page:Sand - Promenades autour d un village - 1866.djvu/59

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tains animaux obéissent aveuglément à des nécessités fatales, ou s’ils ont, dans la mesure de leurs besoins, le discernement raisonné qu’on leur refuse. Moi, je penche pour la dernière hypothèse.

Et, puisque nous sommes en Creuse, demandons-nous pourquoi le saumon quitte les eaux salées pour venir déposer sa progéniture dans les eaux douces. Lui qui est un grand voyageur, fait-il deux ou trois cents lieues contre le courant, dans les méandres et dans les obstacles des fleuves et des rivières torrentueuses, sans savoir où il va, sans avoir un projet, un but, une volonté, par conséquent une idée ? Allons donc ! Raconte-nous, ô algira ! l’histoire de la petite tribu oubliée dans les grandes crises de l’atmosphère terrestre, sur le petit rocher où te voici. Dis-nous quelle myrtacée a fleuri autour du berceau de tes ancêtres ; si là, dans quelque roche inaccessible, végète encore la plante nourricière, aussi peu soupçonnée des statisticiens de la flore centrale, que tu l’étais toi-même de ceux de la faune entomologique il n’y a qu’un instant !

Je crains de trop m’éloigner de mon village. Mais