Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/186

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d’autres ne s’étaient couverts d’une cuirasse. Mais ceux qui se portent bien sentent ce feu d’une vie nouvelle circuler dans leurs veines.

Un des prodiges les plus frappants, parmi toutes ces prodigieuses innéités récemment signalées dans le peuple, c’est le génie poétique de Charles Poncy, ouvrier maçon de vingt-deux ans, qui manie à Toulon, en ce moment, avec une égale aisance, avec une égale ardeur, la truelle et la plume. Un premier volume de vers de ce jeune homme a déjà paru en 1842, précédé d’une notice et publié par les soins de M. Ortolan. Ce premier recueil annonçait des facultés éminentes ; elles se sont rapidement développées avec une largeur, avec une énergie que les lecteurs apprécieront. L’année dernière, la Revue indépendante a publié une nouvelle pièce de vers de Poncy, adressée à Déranger, qui marquait, entre ses premiers essais et ceux que nous publions aujourd’hui, une phase de progrès bien remarquable. Déranger en jugea ainsi, et lui répondit la lettre touchante et noble que voici :


« Mon jeune confrère, combien je suis touché de l’honneur que me fait la belle ode que vous m’adressez ! Votre recueil, que j’ai lu avec une scrupuleuse attention, contient d’excellents morceaux, et il n’y en a pas un qui n’ait causé ma surprise. Eh bien, je ne sais si votre nouvelle ode n’est pas supérieure à toutes ses aînées. C’est l’avis de plusieurs bons juges à qui je l’ai fait voir avec un sentiment d’orgueil, entre autres de notre vénérable Lamennais, qui, par Arago, a eu, un des premiers, la révélation de votre mérite poétique. Tous ont admiré le travail facile et élégant de votre versification chaude et colorée. Mais, vous le dirai-je ?