Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/149

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S’il n’est qu’un homme médiocre, la vérité ne se lèvera point sur ce labyrinthe de contradictions : il s’y égarera de plus en plus, et on se fatiguera en pure perte à l’y suivre dans les ténèbres. S’il porte une âme perverse, il se passionnera pour le mal ; s’il est un lâche, il restera froid et se parera, comme beaucoup, ont osé le faire, d’une fourbe et honteuse impartialité.

Et le despote et le meurtrier passeront la tête haute à travers un siècle d’impunité criminelle. Et les victimes gémiront en vain, la foule sceptique leur criera : « Que sais-je ! » Parce que le juge prévaricateur se sera lavé les mains, en disant : « Je ne veux pas savoir. »

Oh ! combien ont été crucifiés, combien pendent encore sanglants et défigurés au fatal gibet de l’opinion publique, grâce à l’impartialité de stupides ou de méprisables historiens !

Combien sont restés exposés aux chiens et aux vautours, sans que les hommes osassent se demander si ces cadavres méritaient les gémonies ou le panthéon, faute de juges qui eussent pénétré le mystère des faits, apprécié la justice des causes, et trouvé le courage de dire aux hommes : « Brûlez ce que vous avez adoré, adorez ce que vous avez brûlé. »

C’est qu’il faut un grand courage pour dire cela, et surtout dans une époque de doute, de froideur et de crainte.

Vous allez vous passionner pour le bien, criera-t-on de toutes parts ? donc, vous êtes insensé. L’injustice