Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/302

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tique. Cette action est si nouvelle chez le peuple, qu’il est impossible d’exiger de lui la prévoyance, le calcul, le jugement des hommes et des choses, en un mot toute cette science des faits qui constitue la raison politique. Le peuple tend au socialisme, dont le point de départ est le sentiment de son droit et de ses besoins. Il y a longtemps que nous sommes d’accord sur ce point, que le socialisme ne peut se passer de la politique et que la politique ne peut se passer du socialisme. Penser autrement, c’est vouloir séparer le corps et l’âme, la volonté et l’action. Pour avoir été politique et non socialiste, la République modérée est arrivée à mécontenter le peuple. Pour être socialiste et non politique, le peuple arrive à compromettre par un choix imprudent le principe même de sa souveraineté. Mais un peu de patience. Dans peu de temps, le peuple sera socialiste et politique, et il faudra bien que la République soit à son tour l’un et l’autre.

Je m’inquiète peu du personnel des gouvernements, ou du moins je m’en inquiète beaucoup moins que du grand symptôme de l’opinion populaire. Les hommes montent au pouvoir et tombent aussitôt. Ils s’usent en peu de jours. Les uns nous trompent, les autres se trompent eux-mêmes. Ce sont là des vicissitudes secondaires dans l’histoire d’une démocratie. L’histoire désormais changera de caractère. Ce ne sera plus seulement le récit des faits et gestes de certains hommes ; ce sera principalement l’étude des aspirations, des impressions et des manifestations des masses. Ce qui vient de se passer est un grand fait,