Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/80

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sur la nécessité d’une doctrine sociale et d’une religion politique pour l’avenir.

Les socialistes s’attachent spécialement à l’idée abstraite de la justice et de la vérité, sans s’occuper suffisamment, peut-être, de la lutte actuelle, qu’il ne faudrait sans doute pas abandonner. Il leur semble que faire conquérir des droits aux masses n’est pas le plus pressé, mais qu’il s’agirait, avant tout, d’éclairer ces masses sur leurs devoirs. Travail plus complexe, plus profond et plus difficile que ne le pensent les politiques. Dans leur impatience, ces derniers croient et affirment que trois mots immortels, consacrés par la Révolution et inaugurés comme frontispice à nos institutions, suffisent à tout expliquer, à tout résumer : « Liberté, égalité, fraternité ! » — À quoi les socialistes répondent, non sans raison, que toute formule est vaine, tant sublime soit-elle, si elle n’est l’expression d’une doctrine établie, acceptée et pratiquée, au moins dans les mœurs de la nation. Or nous sommes encore si loin de l’acceptation et de la pratique de cette doctrine, la doctrine elle-même est si peu formulée, que l’on n’oserait en discuter l’esprit et les conséquences aujourd’hui, sans s’exposer à subir les rigueurs d’une loi qui interdit l’examen du mieux, et permet à peine la critique du mal. Les socialistes ont dit : « Vous comptez sur un miracle, le miracle ne se fera pas si vous ne le préparez, et vous n’y songez nullement. Le triomphe de la force, l’excitation de l’enthousiasme, de la bravoure et de la colère, les bonnes intentions, même quand elles sont vagues et enveloppées de