Page:Sand - Tamaris.djvu/110

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Florade n’en cherche pas si long, et peut-être aura-t-on à se défendre de son prestige.

Lequel valait mieux d’être l’ami qu’on accepte, ou l’amant qu’on repousse ?

Si j’avais eu trente ans de plus, je ne me serais pas fait cette question ; j’aurais été fier de mon lot.

Et tout cela était insensé, je le sentais bien. Toutes ces questions que je m’adressais à moi-même restaient sans réponse. Je ne pouvais, pas plus que la Florade, aspirer à la main d’une personne si haut placée. Nous ne devions ni l’un ni l’autre nous exposer à lui paraître mus par une ambition vulgaire dont nous eussions rougi, lui certes autant que moi, car il avait l’âme élevée. Donc, tout nous empêchait et nous défendait d’aimer la marquise, car il ne fallait pas la voir deux fois pour être certain qu’elle ne séparerait pas le don de son cœur de celui de sa vie entière.

Et pourtant j’étais touché, comme on dit à l’escrime. Je ne sais même pas si je n’étais pas déjà grièvement blessé. Je m’en allais cachant et tâchant de fermer vite ma blessure, riant avec Paul et ramassant des plantes au bord du ruisseau. C’était le temps des orchidées. Je lui fis connaître les signes caractéristiques qui distinguent l’ophrys mouche des ophrys abeille, araignée, bourdon, etc. J’eus même le plaisir de trouver l’ophrys lutea, le plus beau de tous