Page:Sand - Tamaris.djvu/181

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Et il descendit le sentier avec l’agilité d’un chat, grommelant aussi longtemps que je pus l’entendre.

J’allai passer la nuit à Turris, songeant à cette bizarre rencontre, à l’imprudente superstition de cette métisse qu’on accusait de sorcellerie et qui donnait prise aux persécutions par ses folles croyances. Je songeais surtout à ce la Florade dont je fuyais la présence, et dont le nom me poursuivait jusque dans les lieux où je croyais pouvoir être seul avec les loups. Je comptais retourner voir lever le soleil de la cime du Coudon, afin de posséder dans mon souvenir ce grand spectacle d’un immense et magnifique pays éclairé dans les deux sens opposés ; mais le vent d’est s’éleva durant la nuit, et, bien que le hameau fût un peu préservé de sa rage par la cime crénelée de la montagne, des tourbillons refoulés vers le nord arrivaient dans l’échancrure de la croupe avec des hurlements et des chocs formidables. Je m’étais casé dans une vieille maison occupée par des gens propres et hospitaliers. Le chef de famille était contre-maître dans une verrerie située auprès des sablières, à la porte du hameau. La tempête et l’excitation de la marche m’empêchèrent de dormir. J’ai pu étudier, durant ce printemps-là, l’accent et l’intonation des vents de la Provence. Le mistral, qui vient de la vallée du Rhône et qui passe à travers les montagnes, a l’haleine courte, le cri entrecoupé de hoquets qui arrivent comme des dé-