Page:Sand - Tamaris.djvu/73

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Une des causes de la mélancolie noire à laquelle a succombé votre vieux parent — je sais qu’on vous a tout dit — est certainement cette association impossible qu’il a eu la charité de ne pas rompre, mais qui lui a pour ainsi dire ôté peu à peu la moitié de son cœur et de son cerveau.

» Or, je ne veux pas faire comme lui. Je ne veux pas vivre conjugalement avec Nama ; mais je ne veux pas non plus être son amant, car Nama est mademoiselle Roque, Française et passible des mœurs et usages de la société française. Elle a beau n’y rien comprendre, avoir été élevée dans une cave et ne pas savoir les conséquences d’une faute, je les connais, moi, et je serais un misérable si je la séduisais pour l’abandonner. Vous me croyez, j’espère, je ne suis pas menteur !

— Je vous crois parfaitement ; mais permettez-moi de vous dire…

— Ce que vous allez me dire, je le sais ! je me le suis dit à moi-même. J’ai eu tort, grand tort de rendre quelques visites à mademoiselle Roque. Écoutez l’aventure, elle n’est pas compliquée.

» Un soir, il y a six semaines, en revenant seul de chez Pasquali, c’était trois jours après la mort tragique du vieux Roque, j’entendis des cris effroyables partir de la bastide. Je crus qu’on assassinait les femmes restées seules en cette maison en deuil. Je ne fis qu’un saut ; j’enfonçai la porte d’un coup de