Page:Sand - Theatre complet 1.djvu/335

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nos aventures m’ont semblé plus divertissantes que fâcheuses. Je l’aime, cette vie vagabonde, et ne me l’étais point imaginée aussi agréable qu’elle l’est en votre compagnie.

MOLIÈRE, regardant de temps en temps Armande.

Vous parlez ainsi pour ne me point affliger, sachant bien que je voudrais vous donner toutes les aises et que je souffre de ne pouvoir ôter les épines de votre chemin. Quel caractère généreux est le vôtre, Madeleine, et qu’un mot de vous doit donner de courage et de consolation !

MADELEINE.

Vous ne vous connaissez donc point vous même, Molière, car vous êtes mon modèle, et c’est à vous que je m’efforce de ressembler pour être satisfaite de moi.

ARMANDE.

Ah ! mon Dieu, que de compliments ! Est-ce un rôle que vous récitez là tous les deux ?

MADELEINE.

Je dis ma pensée, qui devrait être la vôtre aussi, Armande.

ARMANDE.

Oh ! ma pensée, la voici pour le moment. J’ai chaud, j’ai faim et je suis lasse.

MOLIÈRE.

La pauvre mignonne ! hâtons-nous donc de déjeuner.

Il s’approche du panier : Armande se lève.
MADELEINE.

Non pas avant que nos camarades, qui prennent de la peine, soient ici pour commencer avec nous. Ne gâtez point cette enfant, mon ami ; ne faut-il pas qu’elle apprenne à patienter et à souffrir comme les autres ? Elle a voulu voyager avec nous, elle veut être comédienne ; je la trouvais encore trop jeune, vous m’avez forcée de céder ; et, maintenant qu’elle y est, il la faut habituer à porter son mal sans se plaindre.

MOLIÈRE, à Armande, qui hoche la tête.

Votre sœur a, parbleu, raison, Armande : il faut de la patience. (Il passe ses mains derrière lui, soulève le couvercle du panier et