ACTE DEUXIÈME
Scène PREMIÈRE.
Dansez, pêcheur napolitain.
Sans nul souci…
(Parlant.) Allons, c’est fini, ça ira comme ça.
Sans nul souci du lendemain.
(Parlant.) Sans nul souci ? Il fut un temps, bien près de moi… quoiqu’il me semble avoir franchi des siècles depuis moins d’une année, où je chantais cela naïvement ! Aujourd’hui, j’ai l’amour, le bonheur et l’épouvante ! Ne pas croire en moi, mon Dieu ! quand tout en moi lui appartient, jusqu’à la moindre de mes pensées ! (Il se lève.) Ah ! malheureux ! tu aurais dû ne jamais réfléchir, ou ne jamais aimer ! Aujourd’hui, c’est en vain que tu es sincère, purifié, irréprochable ! La vertu est cruelle et l’innocence soupçonneuse !… Deux jours sans la voir ! Il me semble qu’il y a déjà deux ans ! Non, je ne pourrai pas me tenir parole ! Elle m’écrira… elle va m’écrire ! Elle viendra peut-être ! Elle est bien venue déjà deux fois… m’ôter mon courage et ma fierté ! mais viendra-t-elle une troisième ? (Il écoute un bruit au dehors.) Est-ce une voiture ? Non, c’est le roulement d’un tambour de basque ; quelques musiciens de carrefour ; d’anciens collègues, d’anciens camarades, peut-être ! (Il a mis de l’argent dans un morceau de papier et le jette par la fenêtre sans regarder.) Et elle épouserait ce passé de misère et d’abandon ! elle ! une grande dame ! la veuve d’un pair d’An-