Que répondez-vous ?
Rien. J’écoute !
Alors, je répondrai, moi. Le duc a raison de dire que le monde appartient à ceux qui s’en emparent, et qu’il subit le prestige du succès. On aime les gens heureux, oui, certes ; mais c’est à la condition qu’ils soient actifs, ambitieux, habiles ! Pourquoi ? Parce que ceux-là répondent à tous les instincts d’une société avide d’entreprendre des choses difficiles et neuves. Ils ne vont pas seuls ; tout s’agite et monte avec eux. On les trouve logiques ; ils le sont. Mais celui que l’amour sollicite à l’inaction et condamne à un doux néant… le sacrifice est beau, sans doute, mais le monde n’y comprend rien. Il veut que les passions éclatantes soient justifiées par l’emploi de facultés éclatantes ; et il raille cruellement, chez une femme, les affections dont le but lui semble trop facile à deviner. Alors, plus il a été forcé de la respecter, cette femme, jusque-là timide et voilée, plus il se divertit de ce qu’il appelle une faiblesse ; et cette faiblesse-là, le mariage ne la légitime pas, il la divulgue.
Et tu dis ?
Rien. J’écoute !
Moi, je dis que, tu serais bien niais d’avoir de pareils scrupules à l’égard de celle qui te coûte si cher !
Non, je la bénis ! elle me force, elle m’habitue à travailler ! (Remuant des livres.) Tenez, je lis, je m’instruis, je veux devenir un esprit sérieux… Ce n’est pas si difficile que je croyais !
Oui ; quelque chose de beau ! de la science, des joujoux et des cruches ! Tu iras loin avec ça !