Oh ! certainement ! Je suis sur la pelouse du palais ducal, et non plus dans vos écuries, où vous m’avez fait traiter beaucoup moins bien que vos chevaux ; car non-seulement ils sont mieux nourris que moi, mais encore ils ont des écuyers bien payés qui les dressent aux allures du manège ; tandis que, moi, je n’ai acquis sous votre tutelle que de la croissance, avantage que vos troupeaux partagent avec moi. Vous m’avez fait manger avec les derniers de vos valets, espérant étouffer la noblesse de mes instincts… (Il se lève sur place.) Mais sachez que je porte en moi la fierté de mon père, et que je la sens aujourd’hui se révolter contre la servitude !
Fort bien ! Savez-vous, monsieur, à qui vous parlez ?
Beaucoup mieux, monsieur, que vous ne savez qui je suis. La coutume des nations vous accorde, par courtoisie, la supériorité sur moi, parce que vous êtes le premier-né ; mais, y eût-il vingt frères entre nous, nous n’en sommes pas moins le même sang, et, en cherchant à me ravaler, vous vous dégradez vous-même !
Comment donc, jeune drôle ?…
Allons, allons, mon frère aîné ! vous êtes trop jeune pour cela !
Tu portes la main sur moi, vilain ! Lâche-moi !
Je ne suis point un vilain, et, pour parler ainsi du fils d’un noble père, tu mériterais…
Messieurs !… messieurs !… par respect pour sa mémoire !…