Vous avez du cœur et du courage ? Prenez garde ! vous souffrirez beaucoup.
Je ferai des ingrats ?
Oh ! certainement.
Même en donnant ma liberté, ma fortune, ma vie pour sauver quelqu’un ?
Mademoiselle de Saintrailles, ne donnez tout cela qu’à un homme qui vous aimera passionnément.
Et il ne sera pas ingrat, celui-là ?
Peut-être que si ; mais, du moins, il n’aura pas été lâche en acceptant vos sacrifices.
Monsieur de Villemer, je vous remercie de votre franchise ; mais je suis destinée à vivre dans le monde et je ne le vois pas si noir que vous dites. Je me dévouerai, parce que c’est mon rêve, mon idéal, mon poëme ; chacun a le sien ! J’ai voulu tout de suite choisir le plus beau. Je ne m’inquiéterai pas de l’avenir ; je suis peut-être une force que Dieu veut employer ! J’irai droit devant moi, j’écouterai parler mon cœur, je guérirai au besoin celui des autres, et je serai heureuse, parce que je veux être bonne. Bonsoir, monsieur de Villemer ; merci pour vos herbiers, je les attends demain.
Vous les aurez. Pardonnez-moi de dire des choses tristes, et de vous avoir montré ma misanthropie. Voilà comme on fait le mal… en sachant que c’est le mal !
À la bonne heure, je réponds de votre conversion.