Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/364

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FLORIMOND.

Tais-toi ! tu sais que je ne puis souffrir les enfants, et que je perds facilement patience avec eux.

FABIO.

Je sais que tu ne t’accommodes que de tes chiens, parce qu’eux seuls se laissent battre sans mordre.

FLORIMOND, haussant les épaules.

Jargonneur !

FABIO.

Malotru !

FLORIMOND, soulevant la portière.

Ah ! voici la caporal Ergaste qui fait son entrée ! Dirait-on point d’un fourgon qui va verser ? Et cette grimaceuse de Marinette, avec ses gras de jambes postiches et tous ses appas de contrebande : la pécore ! hein ! Voici Marielle ! le beau Scaramouche se fait vieux ! la face se creuse et l’œil se ternit !

FABIO.

À sa place, je me retirerais. Attendra-t-il que le public l’en avertisse ? n’a-t-il point assez de réputation et de fortune ?

FLORIMOND.

De la fortune ! Toi et beaucoup d’autres devriez savoir qu’il n’en a point, pour avoir trop aidé à se faire duper ! Quant à sa réputation, elle ne baisse pas encore. C’est bien à toi de juger ton maître ! T’imaginerais-tu de le remplacer ? Un vieux de cette trempe-là, vois-tu, vaut dix mille muguets comme toi. Allons, c’est à ton tour de montrer ce que tu sais faire ! Va ! mets ta bouche en fer de flèche et roule tes yeux en tyran des cœurs, Cupidon déchaîné ! Va-t’en, de bronchade en bronchade, mettre, avec tes regards amoureux, le feu aux loges des dames. Fais-les brûler et fondre par douzaines ! Il n’en est pas moins assuré que, lorsque le vieux Scaramouche viendra à ton encontre, les bras croisés, la bouche entr’ouverte, et l’œil pétrifié par une feinte surprise, il fera plus d’effet avec rien que toi avec toutes les grâces.