Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/402

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Ah ! nous allons être bien contents, tous !… n’ayant plus de soucis, il nous faut nous donner à notre art avec passion, n’est-ce pas ? Le temps presse ! (Montrant Fabio.) Voilà un enfant qui se meurt d’impatience d’aborder le comique. Il le faut contenter. Vois-tu, moi, je veux tout ce que tu veux, et plus que tu ne le veux toi-même ; mais, dans ces rôles-là…

ERGASTE.

Marielle, ne te fatigue pas à trop parler.

FLORIMOND.

Oui, oui, vous vous agitez trop !

MARIELLE, debout.

Laissez-moi donc lui expliquer…

FABIO.

Demain, mon père !

MARIELLE, vivement.

Tu es un paresseux qui ne veut rien apprendre !

SYLVIA.

Mon Dieu ! ses esprits s’égarent encore ! Ne le contrariez point, mes amis !

PIERROT.

Laissez-le dire, il sera tranquille après.

MARIELLE.

C’est vrai ! ils sont tous ainsi ! ce n’est jamais l’heure de travailler !… Voyons, nous voici sous les grands arbres, dans les montagnes. Un beau jour, un généreux soleil ! Jamais on n’étudie mieux qu’au sein de la nature. Fabio, écoute-moi bien. Tu ne m’auras point toujours pour t’enseigner. Je te veux faire hériter de mon talent comme de ma gloire. Je te l’ai dit vingt fois… tu cherches trop dans l’art les beautés fardées. Rappelle-toi la leçon des maîtres : « Plus l’art est caché, plus il est beau… » Dans la perspective du théâtre, pour obtenir de grands effets, il faut déguiser les moyens, comme le décorateur cache les cordes et les poulies de ses machines. Le comédien parfait doit cacher de même les artifices de son jeu et ne se point donner tout entier dans toutes les parties de son rôle. La sobriété, c’est le dernier mot du savoir… Sans