Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/135

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une jeune fille noble que je connaissais déjà, puisque j’avais été amoureux d’elle.

» — Ah çà ! lui dis-je, est-ce qu’il s’agirait par hasard de la petite de Nives ?

» — La petite de Nives, répondit-elle, est maintenant une jeunesse de dix-neuf ans, belle et bonne comme un ange.

» — Mais elle est au couvent ?

» — Oui, de l’autre côté de ce mur contre lequel vous vous appuyez.

» — Allons donc !

» — C’est comme je vous le dis. Cette vieille maison où nous sommes fait partie des dépendances du couvent. Je m’y suis établie comme locataire peu après l’époque où mademoiselle Marie y a été enfermée. Je le lui avais promis, et nous étions d’accord sur la manière de nous conduire. Je ne pouvais pas cacher que j’avais été sa nourrice, mais j’ai su jouer mon rôle. Les religieuses, qui voulaient la contraindre à prendre le voile, se méfiaient un peu de moi quand je leur demandai de l’ouvrage, et elles me tâtèrent adroitement pour savoir si je n’encouragerais pas la résistance de leur pensionnaire. Je fus plus fine qu’elles ; je leur répondis que Marie avait grand tort, que l’état le plus heureux était le leur et que j’avais toujours agi dans ce sens auprès d’elle. On nous mit en présence ; nous étions sur nos gardes : elle m’accueillit très-froi-