Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

» — Tu as raison, me répondit-elle. Tu ne peux plus venir comme autrefois, je suis seule à la maison, et ce ne serait pas convenable ; mais, si tu vas dimanche voir Jaquet à Champgousse, nous nous y rencontrerons.

» Je ne sais pas si j’ai répondu quelque chose. Je suis parti, courant comme un brûlé, j’ai été moi-même chercher Prunelle à l’écurie, j’ai repris ventre à terre le chemin qui devait me ramener ici. Et puis je me suis arrêté court en me demandant si je ne rêvais pas, si je n’étais pas fou. Miette Ormonde infidèle ou dépravée, cachant un amant dans sa maison ! Non, ce n’est pas possible, me disais-je ;… mais je veux savoir et je saurai ! J’irai voir Jacques. Je le questionnerai franchement. Il est honnête homme, il est mon ami, il me dira la vérité.

» J’ai donc pris le chemin de traverse qui mène à Champgousse. Je me suis un peu perdu, il faisait tout à fait nuit. Enfin j’arrive dans l’obscurité, j’entrevois la masse des bâtiments qui ne me paraît pas notablement changée. Je mets pied à terre au milieu des chiens furieux. Je cherche la porte du logis de maître, et tout à coup cette porte s’ouvre. Dans la lumière projetée de l’intérieur, je vois se dessiner la monumentale silhouette de Jacques Ormonde dans la tenue d’un homme qui sort de son lit.

» Il se jette dans mes bras, me serre vigou-