Page:Sand - Valvèdre.djvu/137

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enfant comme moi, et que, dans tous les cas, ce sujet de causerie ne me donnerait sur vous aucun avantage. Quand vous m’aurez quitté, je pourrai bien trouver, en prose ou en vers, quelque tirade à effet pour vous répondre ou vous consoler ; mais, ici, devant une figure qui commande la sympathie, devant une parole qui impose le respect, je me sens si petit garçon, que je ne me permettrai même pas de vous plaindre, certain que je suis d’avoir beaucoup moins de sagesse et de courage que vous n’en avez vous-même.

Ma réponse le toucha ; il me tendit la main en me disant que j’étais un modeste et brave garçon, et que je venais de lui parler en homme, ce qui valait encore mieux que de parler en poëte.

— Ce n’est pourtant pas, ajouta-t-il en secouant sa mélancolie par un généreux effort, que je dédaigne les poëtes et la poésie. Les artistes m’ont toujours semblé aussi sérieux et aussi utiles que les savants quand ils sont vraiment artistes, et un grand esprit qui tiendrait également du savant et de l’artiste me paraîtrait le plus noble représentant du beau et du vrai dans l’humanité.

— Ah ! puisque vous voulez bien causer avec moi, repris-je, il faut que vous me permettiez de vous contredire. Il est bien entendu d’avance que vous aurez raison ; mais laissez-moi émettre ma pensée.

— Oui, oui, je vous en prie. C’est peut-être moi qui ai tort. La jeunesse est grand juge en ces matières. Parlez…