Page:Sand - Valvèdre.djvu/208

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ressés, des preuves de dévouement, la joie de procurer un petit plaisir féminin à une femme recherchée ? Vous ne comprenez pas cela, vous ! Vous vous êtes dit : « Je mériterai et j’obtiendrai l’amour par mes talents et ma rhétorique. » Moi, je n’ai pas de talents. Toute ma valeur est dans ma richesse. Chacun offre ce qu’il a, que diable ! Je n’ai jamais eu la pensée d’acheter une femme de ce mérite ; mais, si par ma passion j’avais pu la convaincre, où eût été l’offense quand je serais venu mettre mes trésors sous ses pieds ? Tous les jours, l’amour exprime sa reconnaissance par des dons, et, quand un nabab offre des bouquets de pierreries, c’est comme si vous offriez un sonnet dans une poignée de fleurs des champs.

— Je vois, lui dis-je, que nous ne nous entendrons pas sur ce point. Admettez, si vous voulez, que j’ai un scrupule déraisonnable, mais sachez que ma répugnance est invincible. Jamais, je vous le déclare, Alida ne viendra ici.

— Vous êtes un ingrat ! fit Moserwald en levant les épaules.

— Non, m’écriai-je, je ne veux pas être ingrat ! Je vois que vous ne m’avez pas trompé en me disant qu’il y avait en vous des trésors de bonté. Ces trésors-là, je les accepte. Vous savez le secret de ma vie. Vous l’avez surpris, je n’ai donc pas eu le mérite de vous le confier, et pourtant je le sens en sûreté dans votre cœur. Vous voulez me conseiller dans l’emploi des moyens matériels qui peuvent assurer ou compro-